Chantier, nuisances, perte d’ensoleillement : quels recours pour les voisins ?


Aucun propriétaire ne voit évidemment d’un bon œil le démarrage d’un chantier de construction à proximité de son bien.
Outre le bruit que ne manqueront pas de provoquer les travaux, les immeubles avoisinants peuvent également craindre des dommages mécaniques, des phénomènes de fissuration par exemple.
En outre, lorsque le bâtiment neuf est enfin achevé, les voisins constatent parfois, fort dépités, une perte d’ensoleillement qui, non seulement, dégrade leurs conditions de vie, mais encore fait perdre au bien une partie de sa valeur vénale.

Nuisances de chantier

L’existence d’un chantier n’est pas, en soi, un trouble anormal de voisinage, spécialement en milieu urbain.

C’est un inconvénient, certes, mais un inconvénient « normal », dont on ne peut obtenir indemnisation.

Il en va différemment lorsque les entreprises prennent des libertés avec les règles de la propriété.

Cela peut être le cas notamment lorsque des clôtures sont détruites et qu’un échafaudage est installé, sans autorisation, sur la propriété voisine pour permettre l’édification du bâtiment neuf en limite séparative des 2 propriétés.

De tels agissements sont sanctionnés.

Par exemple, des propriétaires ayant dû supporter l’implantation d’un échafaudage sur leur parcelle, sans accord préalable, ni indemnisation, ainsi que l’arrachage d’une clôture existante, ont obtenu 2.000 € à titre de dommages-intérêts (Rennes, 22 septembre 2015, RG n°13/08681).

La perte d’ensoleillement


Mais, s’ils ont agi en justice, c’est essentiellement pour obtenir l’indemnisation de la perte d’ensoleillement liée aux dimensions de la construction neuve.


Sur ce terrain, ils ont obtenu pas moins de 33.000 € de dommages-intérêts :

  • 30.000 € en indemnisation de la perte de valeur du bien,
  • 3.000 € en indemnisation du trouble de jouissance.

Ce résultat doit être salué dans la mesure où la perte d’ensoleillement n’est pas systématiquement indemnisée.

Dans l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt précité de la Cour d’appel de Rennes, décision confirmée par la Cour de cassation, la perte d’ensoleillement est considérée comme un trouble anormal de voisinage eu égard à :

« la configuration en longueur et de faible largeur de la parcelle, la propriété de M. et M X… avait subi une perte d’ensoleillement significative, tant dans la cour intérieure qu’au niveau des ouvertures du rez-de-chaussée et du premier étage, à la suite de la construction, sur la parcelle contiguë, d’un immeuble d’une hauteur supérieure à seize mètres et bien plus importante que celle du bâtiment préexistant » (Civ. 3ème, 19 janvier 2017, pourvoi n°2017-15-28.591).


Ainsi, la perte d’ensoleillement est indemnisée au cas par cas, selon l’appréciation qu’en auront les juridictions.

Cette décision est néanmoins intéressante, sur le plan des principes, puisqu’elle confirme que le fait que le bâtiment privé d’ensoleillement soit situé en milieu urbain, ne prive pas ses propriétaires, par principe, de toute indemnisation de ce chef.


Il est, en revanche, évident que le préjudice résultant de la perte d’ensoleillement sera évalué différemment selon que l’immeuble concerné est situé en milieu urbain dense ou en milieu rural.